Monsieur le Président,


je vous écris, parce qu'aujourd'hui, j'ai peur.

Peur, et honte, aussi.

Peur, de ce que mon pays devient.

Moi, naïvement, depuis toute petite, la France, je voyais ça comme un pays de liberté, de frondeurs, aussi, insolents, râleurs beaucoup, mais c'est ce qui fait leur charme, fiers de leurs droits, de leur exigence de fraternité, de leur culture enfin.

Culture née d'une immense diversité.

Je le sais, j'ai fait de l'ancien français, et si ça ne m'a pas donné de boulot, ça m'a appris que notre langue est riche de multiples apports étrangers.

Mais aujourd'hui cette France que j'ai fantasmée, je ne la vois plus nulle part.

A la place, je n'entend que des récriminations racistes, sexistes, xénophobes, le xéno- ici étant l'Autre sous toutes ses formes. Le plus riche que moi, le plus pauvre, le plus foncé, le plus gros, le plus fonctionnaire, le plus chômeur...

Ca, je parie que vous avez lu Machiavel à vos heures perdues, parce que le concept "diviser pour mieux régner", pour ceux qui ne l'avaient pas bien compris jusqu'ici, il est merveilleusement, épouvantablement bien utilisé par vos services.

Hop, tous les mois, toutes les semaines, on choisi une nouvelle cible, et on invite le français à taper dessus.

Les niches fiscales? Le pauvre gars qui a un avantage misérable que les autres n'ont pas? Allez, Haro sur le baudet, tous dessus, on se déchaîne, et plutôt que se battre pour que chacun ait droit à mieux, on lapide le salaud qui peut mettre du beurre sur sa tartine, et on le tire par le bas pour que lui aussi soit dans la même merde que nous.

Tous égaux dans le pire.

Comme ça pendant ce temps, on ne regarde plus en Haut.

Franchement, chapeau.

Honte, parce que je ne fais rien.

La peur s'installe sur nous, et puis ce drapeau rouge qu'on secoue au dessus de nos têtes, la Crise, la terrible Crise, qui justifie qu'on se serre la ceinture en louchant sur l'assiette du voisin, prêt à dénoncer ses excès, tant que personne ne touche à notre gamelle à nous..

Honte, parce que je suis française, et plus du tout fière de l'être.

Et que comme tout habitant de France, c'est ma faute parce que j'ai laissé faire.

Il y a une chose, que je ne comprend pas.

Quel avenir voyez-vous pour la France? L'objectif, à long terme, pour nous, c'est quoi?

Quand tout le monde se sera bien étripé, détesté, rabaissé, abruti, vous avez prévu quoi?

C'est de ça, surtout, que j'ai peur.

Le champs de ruine qui va rester derrière tout ça.

Et la Honte, encore, parce que tous, on l'a vu venir.


Veuillez agréer mes salutations navrées .